Déjà en lutte avec la maladie quand nous avons créé l’AFONT, Martine Segalen (1940-2021) n’a jamais pu participer à ses travaux. Mais elle avait généreusement accepté la proposition d’Hoëlle Corvest d’en être l’une des marraines. Hommage à sa personne et à son œuvre.

 

Au premier plan, une silhouette féminine en pleine course de fond se détache sur un fond de coucher de soleil. Le ciel est entièrement orange, le soleil est plein à l'horizon. On ne distingue rien des détails de la silhouette qui se présente comme une ombre, le poing levé, les bras en mouvements dans l'effort

 

Après une formation initiale à l’Institut d’études politiques de Paris, Martine Tony a été quelques années cadre commerciale dans la grande distribution. C’est un voyage au Mexique qui lui a révélé sa vocation d’ethnologue, et non son mariage avec le petit-fils du poète et ethnographe Victor Segalen.
Recrutée dès 1968 au Musée national des arts et traditions populaires (MNATP), Martine Segalen devient, en 1971, chercheuse du CNRS dans le Centre d’ethnologie française associé au musée. Elle assurera la direction de ce laboratoire de 1986 à 1996 et publiera, lors de la fermeture du musée (transformé en MUCEM à Marseille), l’ouvrage Vie d’un musée (1937-2005), incontournable pour comprendre l’histoire de la muséographie ethnologique en France au XXe siècle. Elle terminera sa carrière comme professeure à l’université de Nanterre.
Spécialiste de l’ethnologie de la France, Martine Segalen a rédigé ou dirigé des nombreux ouvrages sur la sociologie et l’ethnologie de la famille, et consacré sa thèse à Quinze générations de Bas-Bretons. Parenté et société dans le pays bigouden sud, 1720-1980. C’est par son intérêt pour la culture matérielle et pour les pratiques du corps que ses travaux sont proches des préoccupations de l’AFONT.
Passionnée de course de fond, Martine Segalen y a trouvé une hygiène intellectuelle, et même une source d’inspiration. Elle déclarait au Monde, lors de sa dernière participation à la Parisienne, en 2016 : «J’ai écrit des dizaines d’articles en courant». Elle a publié sur la démocratisation de ce sport l’ouvrage Les Enfants d’Achille et de Nike, une ethnologie de la course à pied ordinaire. On y apprend, par exemple, que Kathrine Switzer a été la première femme à courir le marathon de Boston, en 1967, et comment le directeur de la course s’est lancé à sa poursuite pour lui arracher son dossard. Il faudra cinq années de lutte pour que l’inscription des femmes devienne officielle à Boston, et douze autres pour que le premier marathon olympique féminin ait lieu en 1984. «Le droit de courir pour les femmes est arrivé très tard», rappelait Martine Segalen.
Lire les articles du Monde en 2016 et 2021.

Photographie d’illustration: Mohamed_Assan pour Pixabay.com