Ce jeudi 18 juin 2020, de 14h à 16h30, plus de 100 personnes ont participé au visioséminaire (ou webinaire) intitulé «Réflexion autour de l’accessibilité des dispositifs tactiles en situation Covid», organisé par l’École de Design Nantes Atlantique et Florent Orsoni.
[Postscriptum de 2022: on sait désormais que le corona virus se transmet par la respiration et par la salive. Le contact entre des mains propres ou avec des surfaces, tout en continuant à se désinfecter les mains, n’est donc pas en cause. Or personne ne le dit, et la fermeture dramatiquement longue des lieux culturels a montré que notre société reste dans la logique du tout ou rien.]
Groupe de visiteurs touchant une oeuvre lumineuse

Le webinaire a été animé par Florent Orsoni, Directeur du City Design Lab, sous le patronage de Thierry Jopeck, chargé du handicap et de l’inclusion au ministère de la Culture. Il s’agissait du premier tour de table de la réponse française à l’initiative lancée par l’Institute for Human Centered Design de Boston et sa directrice Valerie Fletcher. L’Association pour la FONdation du Toucher, représentée par plusieurs de ses membres, se joint naturellement à cette démarche.
Comme l’indiquait le programme, «au-delà de la problématique des personnes en situation de handicap visuel, le toucher structure notre perception de l’espace, parfois même d’une œuvre. De même, l’accès aux différents outils de médiation (audioguides, écrans) se retrouve très fortement impacté» par la crise sanitaire. Le consensus s’est rapidement fait sur l’idée que les visites numériques ne peuvent être qu’un complément, et en aucun cas une alternative aux parcours physiques dans les lieux culturels. De même, concernant les personnes déficientes visuelles, l’audiodescription des œuvres apporte des compléments d’information, mais l’expérience esthétique réside dans le contact physique avec les œuvres, leurs reproductions ou, pour le spectacle vivant, avec l’espace et les accessoires scénographiques.
Il a donc été convenu de lancer un appel au permis de toucher et de lister les nouvelles pratiques répondant positivement aux exigences sanitaires. Par exemple, il est facile et peu onéreux d’associer l’usage systématique du gel hydroalcoolique à des signatures olfactives en rapport avec les thématiques d’exposition. Ou encore, d’intégrer aux revêtements du mobilier des nanoparticules désinfectantes. Il faudrait enfin que soit diligentée une étude sur l’efficacité des «gants liquides», qui déposent un film isolant sur les mains des usagers: il s’agirait de vérifier que cette technique préserve l’intégrité et la salubrité des matériaux, d’une part, la qualité des perceptions tactiles, d’autre part.
Plus généralement, comme l’a pointé un des intervenants, pourquoi les lieux culturels devraient-ils se soumettre à des normes plus restrictives que les espaces commerciaux dans lesquels tout un chacun continue de manipuler les objets en se lavant les mains avant et après?

Déclaration du 18 juin 2020: retrouver le sens du toucher…
pour le développement d’une culture du tactile dans les institutions culturelles

«Nous étions une centaine de personnes aveugles, professionnels des musées et du spectacle vivant, designers, étudiants et universitaires à participer le jeudi 18 juin au séminaire en ligne “Accessibilité aux dispositifs de médiation en situation sanitaire COVID: Enjeux, réflexions et avancées en France et à l’international”. Nous sommes des francophones de France, Allemagne, Italie, Slovénie, Portugal et États-Unis.
«Le séminaire était organisé par L’École de Design Nantes-Atlantique, en collaboration avec Institute of Human Centered Design à Boston, avec le soutien du Ministère de la Culture.
«Nous nous sommes réunis pour répondre à l’urgence de la situation, pour échanger sur les bonnes pratiques émergentes afin d’assurer la continuité de l’accessibilité de l’offre tactile et de médiation existante dans les lieux de culture pour tous les publics, en particulier les publics aveugles et déficients visuels.
«Au cours de notre rencontre, une volonté s’est fait jour pour une mise en commun de nos expériences et savoirs afin de relever ce nouveau défi tout à fait inattendu.

« Ainsi nous nous engageons à:

• Assurer des visites en toute sécurité, dans le respect des précautions sanitaires, avec une offre au moins équivalente,
• mettre en réseau les bonnes pratiques, les procédures à l’ère du Covid-19 ou d’autres crises sanitaires,
• mutualiser les recherches de solutions nouvelles, les innovations et expérimentations,
• engager une réflexion sur la construction d’une culture tactile qui prenne en compte l’importance du toucher comme mode de connaissance et d’accès à l’émotion esthétique.
«Les organisateurs et les réseaux existants, tels la RECA, Accès culture ou le site www.accessibilite-patrimoine.fr œuvreront ensemble afin d’assurer ce partage, et s’appuieront sur l’expertise des associations représentatives des personnes en situation de handicap actives dans le secteur de la culture.
À Nantes, le 18 juin 2020»

Photographie d’illustration: Hans pour Pixabay.com